
Genre : comédie historique
Distribution : 7 femmes, 7 hommes
Durée : 1h40
Editeur : L’œil du Prince
Résumé :
Blanche, Marie, Pauline, trois femmes du peuple de Paris, accompagnées d’un titi surnommé Galmioche, traversent la ville et les événements de la Commune. Au hasard de leurs déambulations elles croiseront le chemin de Louise Michel, Gustave Courbet et de quelques moblots se battant pour l’honneur de la France contre les soldats de Thiers. Sans réelle conscience politique mais emportées par la liesse populaire, elles vont se joindre à la mêlée tragique qui durera 72 jours et s’achèvera au Père-Lachaise, au pied du mur des fédérés.
Victor Hugo dira de cette lutte pour un idéal égalitaire, social et fraternel : » Le cadavre est à terre mais l’idée est debout. «
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Jamais un auteur de fiction ne pourra égaler dans sa démesure, ce que les Hommes et l’Histoire ont pu créer. La Commune est un de ces drames absolus et effroyables qui laisseront leur marque indélébile dans nos manuels scolaires et dans nos âmes. Toute guerre civile est une déchirure extrême, une plaie sanglante difficile à refermer, une douleur difficile à étouffer. Celle-ci qui dura 72 jours ne céda en rien sa place sanglante sur le podium des plus atroces. On a fait taire des hommes par le canon et par la mitrailleuse, des hommes et des femmes venues les épauler. Des hommes et des femmes qui n’entendaient pas pactiser avec les envahisseurs et voulaient ériger une commune libre. J’ai été transporté par la découverte des événements de cette page d’Histoire si proche de nous et que je connaissais si mal. J’ai été ému, bouleversé, désespéré, ahuri, tétanisé. Je regardais les photos de ces combattants des barricades, j’y voyais mon grand-père, ma grand-mère, leurs voisins, leurs amis, des humains que j’aurais presque pu connaître et qui avaient reçu dans leurs corps les balles tirées par des si semblables .Je me suis alors retrouvé projeté près d’eux, dans ce Paris rouge et dévasté, et cette pièce m’est tout naturellement venue du cœur autant que des larmes.
Extrait
…/…
MARIE
Je suis Marie, blanchisseuse. Pour 1 franc 50 par jour je blanchis les caleçons des jean-foutre de réactionnaires pour qu’ils aient leurs fesses bien au chaud. Je blanchis leurs draps, qu’ont des taches qui me feraient honte si c’était moi qui les faisaient. Je blanchis leurs si belles liquettes au col cassé qui portent aussi de bien belles éclaboussures de plats qui seront jamais dans mon assiette. Tu sais qu’elles me causent leurs taches, j’ai appris à les déchiffrer. La tache de gros bourgeois ça n’a rien à voir avec la crasse de prolo, ça te fait voyager. Je vais dans les restaurants grâce à elles, je bois du vin de bouteilles cachetées, je hume les épices, les sauces, les parfums exotiques qui te chatouillent le palais, je déglutis, je salive, je déguste du nanan de chez Procope. Et puis vers le col tu te prends des bouffées de sent-bon que tu verras jamais sur la peau d’une comme toi. C’est rien que du Fragonard, du Roger Gallet, du Guerlain. Enfin, je te parle du haut parce que pour ce qui est d’en dessous de la ceinture, tu te rends compte qu’on est tous les mêmes.
BLANCHE
L’homme c’est jamais qu’un petit cerveau et un gros tas d’organes !
MARIE
L’homme c’est une femme mais en pire. (elles rient) Et tu fais quoi, toi.
BLANCHE
Je travaillais à l’usine mais faute de matière première, faute de commande, elle a fermé.
MARIE
Laquelle ?
BLANCHE
Je dis pas.
MARIE
Pourquoi donc ?
BLANCHE
J’aime pas le dire.
MARIE
Tu fais quoi ? Des armes ? Des chassepots pour tuer nos maris ? Des baïonnettes ?
BLANCHE
Mais non ! T’es folle.
MARIE
Ben quoi alors ? Tu peux le dire, je t’ai bien dit que je travaille dans la souillure.
BLANCHE
Ben…moi… c’est dans le pot de chambre.
MARIE (riant)
Et alors ? C’est pas sale. C’est une fois vendu qu’il le devient.
BLANCHE
T’as raison ! On en fait même des rigolos. Avec un œil dans le fond pour les mariages. Et aussi d’autres avec Adolphe Thiers. Ça doit bien soulager de lui faire un étron sur la fiole.
MARIE
Moi, ça me couperait l’envie !!!
Elles rient à s’en tordre le ventre.
MARIE
Ah, j’aurais jamais pensé que ce nabot enragé pouvait me faire rire.
BLANCHE
Emile, y dit qui faut qu’on le respecte, que c’est le fondateur de la République et que c’est lui qui a empêché les Prussiens de nous bouffer tout cru.
MARIE
C’est qui cet Emile ?
BLANCHE
C’est le mien, celui qui m’a donné son nom et que je dois supporter, le jour sur le dos et la nuit sur le ventre.
MARIE
Et ça n’a pas l’air de te rendre heureuse.
BLANCHE
Bah ! Le bonheur c’est un plat de riches. Emile y dit que, nous autres, on ne l’aura qu’au ciel.
MARIE
Fait sa toilette à l’eau bénite, ton Emile ?
BLANCHE
Y dit que Dieu est si important que là où il se trouve y’a de place pour rien d’autre.
MARIE
Et pourquoi qu’il nous remplit jamais le ventre alors ?
BLANCHE
Emile y dit…
MARIE (la coupe)
« Emile y dit, Emile y dit », hé, tu nous lâches avec ton Emile ? Tu parles jamais avec tes mots à toi ?
BLANCHE
Emile y dit que la femme ça doit s’occuper des chaussettes et point des affaires de la vie.
MARIE
Encore un bon disciple de Proudhon, ton régulier. « Une femme qui exerce son intelligence devient laide, folle et guenon », voilà ce qu’il dit. Ton Emile c’est son petit frère, non ?
BLANCHE
C’est ses idées.
MARIE
Et il te laisse sortir ? D’habitude ça aime pas voir trainer sa gueuse dans les rues.
BLANCHE
Y m’croit à l’usine. Alors moi je suis venu voir où qu’elles vont, toutes ces femmes qui courent par là.
MARIE
Elles vont à Saint Bernard de la Chapelle.
BLANCHE
A l’église ? Y’a des messes à c’t heure ?
MARIE
Non, les messes c’est dans la journée et le soir y’a des réunions. Viens t’en avec moi, ce soir y’a Louise Michel qui va causer.
BLANCHE
C’est qui ?
MARIE
Louise Michel, tu connais pas Louise Michel ? L’instit qui donne des conférences sur nous, sur notre travail, sur l’instruction. Elle dit qu’on doit toucher le même salaire que les hommes pour le même travail.
BLANCHE
Elle est folle. On gagne toujours moins.
MARIE
Justement, elle dit qu’il faut plus. Que c’est pas normal. Qu’on doit se défendre. Tu sais qu’elle a été à l’enterrement de Victor Noir, habillée en homme, avec un couteau sous son manteau ?
BLANCHE
Ah non !
MARIE
Le 22 janvier, habillée en garde national, elle a fait le coup de feu sur l’Hôtel de Ville.
BLANCHE
Oh, ça doit être une bien chabraque c’te femme là.
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